Pourpre et rose de Whistler

L’œuvre dont nous allons parler est un tableau du peintre impressionniste américain James Abbott McNeill Whistler intitulé « Pourpre et rose – Les Lange Leizen aux six marques » (le nom original de l’œuvre est « Purple and Rose: The Lange Leizen of the Six Marks »). Ce tableau a été réalisé en 1864, mais aurait été vendu en 1863 alors qu’il était inachevé, il a été vendu dans les années 1860 à James Leathart qui était un des principaux fabricants et patron du PRB, il a été revendu par celui-ci à l’avocat  John Graver Johnson  en 1893 puis la collection contenant le tableau est finalement léguer à la ville de Philadelphie et est aujourd’hui exposé au Musée d’art de Philadelphie aux Etats-Unis depuis 1963. En quoi ce tableau peut être considéré comme représentatif du mouvement du japonisme ?

Nous allons d’abord parler de Whistler et de son rapport au mouvement du japonisme, puis nous allons étudier l’iconographie de son œuvre, et nous finirons sur l’aspect plastique de l’œuvre.

I)Whistler, un peintre d’exception

A) Parcours d’artiste de Whistler

James Abbott McNeill Whistler est né le 10 juillet 1834 à Lowell, dans le Massachusetts, au nord-est des États-Unis, dans une famille mi-anglaise, mi-irlandaise. Son père, George Washington Whistler, est un ingénieur civil, et sa mère, Anna Matilda Whistler, seconde épouse de George, est une femme très croyante, Whistler à une demi-sœur issu du premier mariage de son père et un frère cadet. En 1842, alors que Whistler à 8 ans, lui et sa famille commence déménage à Stonigton, à Springfield, puis en Russie où le père est chargé de la construction de lignes de chemins de fer, James visitera le musée de l’Ermitage où il découvre l’œuvre de Velasquez, et étudiera à l’académie impérial des beaux-arts où il apprendra le français et le dessin. En 1847 et 1848, la famille séjourne en Angleterre, c’est à ce moment-là que James manifeste son désir de devenir peintre, il a alors 13-14 ans. Mais James, son frère et sa mère retourneront à Pomfret en 1849 à la mort de George et se trouvera dans une situation financière critique. La demi-sœur ne reviendra pas avec eux car s’étant marié au graveur anglais Francis Seymour Haden. Whistler entrera à l’Académie militaire de West Point en 1851 à l’âge de 17 ans, il ne brillera que dans le domaine du dessin et se fera renvoyer après avoir échoué à l’examen de chimie (il dira à ce propos «Si le silicium avait été un gaz, j’aurais été un jour général. »), il aura un emploi au service cartographique de la marine à Washington qui le rebute et lui fera passer des moments difficile. Il démissionnera aussi vite que quand il a été engagé. Il apprendra la gravure. En 1855, il partira étudier la peinture à Paris, après avoir hérité d’une petite somme d’argent. En 1856, il s’inscrira à l’atelier de Charles Gleyre, alors atelier le plus célèbre après celui de Thomas Couture, où il côtoie George du Maurier. D’autres élèves préparent le concours d’entrée à l’École des beaux-arts : Monet, Renoir, Sisley et Bazille. Volontiers plus dandy que bohème, il fera l’objet de caricatures. George du Maurier le dépeint dans son roman Trilby (1894) sous les traits de Joe Sibley, un apprenti pompeux et excentrique. Whistler menaça son ancien ami du Maurier de lui faire un procès. Il se liera d’amitié avec Alphonse Legros et Henri Fantin-Latour. Ils décideront de faire carrière et fonderont la Société des Trois. En 1859, il arrivera à Londres où il passera une longue partie de sa vie. Il se présentera comme un aristocrate sudiste ruiné, bien que sa sympathie envers les sudistes pendant la Guerre civile américaine ne soit pas démontrée. Whistler s’intéressera à la peinture extrême-orientale et collectionnera les porcelaines, les tissus orientaux, et les bois gravés servant à imprimer les tissus. C’est à ce moment-là qu’il entrera dans sa période dite « japoniste ». Whistler est réputé pour son esprit acéré, mais aussi pour son caractère jugé comme insupportable par beaucoup de personnes. Il était en effet réputé pour être un « dandy provocateur ». Il est en effet reconnu pour son élégance voyante, son insolence, et son goût.

B) Mise en contexte de l’œuvre

Whistler est un impressionniste. Il fait donc partie de ces peintres dont les tableaux sont moqués et sévèrement jugé. L’un des exemples les plus connus est La Dame en blanc, qui sera exposé au salon des refusés ouvert par Napoléon III. Le blanc étant une couleur qui n’est utilisé que pour réfléchir la lumière où pour le symbolisme (symbole de pureté et de virginité). Comme beaucoup d’artiste d’entre les années 1860 et 1890, il se retrouve en  plein dans le mouvement du japonisme, en effet, suite à l’arrivé de porcelaine japonaise en Europe, les artistes se retrouvent fascinés par cet art venu d’un pays éloignés du leur. L’Europe entre alors en contact avec le Japon et la culture japonaise commence à influencer l’art, la mode, la littérature, et la musique. Whistler n’en sera pas indifférent et il réalisera plusieurs tableaux qu’on peut qualifier de « japoniste », l’un d’eux est « pourpre et rose » le tableau qu’on étudie. Il faut aussi savoir que Whistler collectionait les tissus orientaux et les poteries japonaise, son intérêt pour l’extrême-orient (surtout le japon) ne se reflétait pas que dans sa peinture. James Abbott McNeill Whistler était aussi connu pour être une figure emblématique du mouvement Esthétique, qui rejetait la richesse et la lourdeur du goût victorien au profit d’un style défini par la perspicacité, la délicatesse et le raffinement. En effet ses peintures, ses dessins, ses estampes témoignent d’une ambition esthétique poursuivie sans relâche, au service de laquelle il multiplia les recherches et les expérimentations techniques.

C) Whistler et le japonisme

La place de Whistler dans le mouvement dit du japonisme est assez importante, en effet les sources qui évoquent l’artiste mettent en avant la double influence du Japon dans ses œuvres : elles se divisent en une première phase où prime tout d’abord l’intégration de motifs typiquement japonais, avant que les œuvres de Whistler ne se tournent vers une réappropriation des principes de composition et de l’organisation spatiale des estampes japonaises. Cette différenciation entre une influence superficielle et une plus déterminante pour l’art du XXe siècle correspond à la lecture privilégiée du japonisme à l’heure actuelle. Cependant le cheminement artistique suivi par Whistler se développent par la suite au-delà de l’influence de l’art japonais, cet aspect de son œuvre n’est pas celle qui nous intéressent. De plus, l’influence japonaise dans ses tableaux se référent plus au décor qu’à l’esprit. En effet, le modèle est une femme non-oriental, en la personne de Joanna Hiffernan, l’amante de Whister dans le tableau « pourpre et rose », qui se contente de s’habiller à la mode extrême orientale et de faire semblant de peindre des porcelaines asiatiques.

II) une scène fortement imprégné de la culture asiatique

A) Description de l’œuvre

On a une scène d’intérieure représentant une artiste féminine assise portant un kimono à imprimé floral, son corps tourné vers la gauche et son attention dirigée vers le bas alors qu’elle peint un motif bleu et blanc sur un vase en porcelaine mince. Dans son atelier, d’autres exemples de pots en porcelaine bleue et blanche sont éparpillés sur les tables. Sur une table derrière elle se trouvent plusieurs pinceaux de différentes tailles.

B) Iconographie de l’œuvre

On peut voir ici que la femme occupe la grande majorité du cadre. Elle est habillée, maquillée, et coiffée de manière à ressembler à une femme chinoise issue d’un milieu aisé. Toute la scène est faite de manière à ressembler à une pièce d’intérieur de style asiatique. On peut voir que le titre de l’œuvre Les Lange Leizen aux six marques vient de Lange Liezen, qui est un terme néerlandais pour « Long Ladies », c’est le nom appliqué à une porcelaine chinoise bleue et blanche décorée d’images de femmes minces. L’intérêt de Whistler pour l’art est-asiatique peut être vu ici dans les accessoires entourant le modèle, dont beaucoup sont basés sur sa propre collection d’art. On a des porcelaines, la tenue de la femme est de style asiatique, on a un éventail, une tasse à thé, et un grand pot de gingembre qui sont présent (le gingembre est une plante originaire d’Inde dont on extrait une épice très utilisé dans la cuisine asiatique). On a aussi quelques autres objets appartenant à Hiffernan et de d’autres exportations.

C) Une scène asiatique que dans le décor

On a un tableau présentant une femme entouré de porcelaine chinoise, elle est assise dans une pose décontracté et elle est vêtu d’une robe de brocart chinois décoré avec des motifs floral de couleur pêche et rose. Elle tient un vase bleu et blanc dans la main gauche, un pinceau dans la main droit et elle semble être en train de peindre. On a un éventail peint orné d’une grue posé sur une commode et d’un plateau avec plusieurs brosses sur la table derrière elle La femme porte du maquillage qui accentue certains traits du visage et à les cheveux attaché et tiré en un chignon ce qui l’a fait ressembler à une chinoise aisée. Le but ici est de représenter une scène avec des éléments décoratifs asiatiques. En effet, le modèle est ici une femme irlandaise, les seuls éléments purement asiatiques sont ses vêtements et les objets du décor, qui sont principalement des porcelaines, une tasse à thé, et un grand pot de gingembre.

III) Une œuvre colorée

A) Les couleurs et la lumière

Le personnage principal est entouré de porcelaines bleu et blanche issu de la collection de Whistler. Les couleurs de fond sont beiges et marron. La femme porte une robe de brocart chinois décoré avec des motifs floral de couleur pêche et rose et tient un vase de porcelaine bleu et blanc les tons plus vifs de la robe et de la porcelaine sont accentués. La scène généralement est beige et marron, l’œil est toujours immédiatement attiré en premier par la femme à cause des couleurs vives de sa robe. L’œil est ensuite attiré par les porcelaines bleus et blanches qui décore la scène et qui sont issu de la collection du peintre lui-même. La partie la plus lumineuse du tableau est la robe de la femme, qui dans cet environnement plutôt fait de bois, concentre la grosse partie de la lumière grâce à ses couleurs vives qui ont été accentué par le peintre.

B) Aperçu plastique

On peut remarquer que le corps de la femme marque une diagonale allant de la partie inférieur gauche jusqu’au coin supérieur droit. Le corps de la femme remplit presque le cadre et pousse le spectateur à la regarder en premier, en grande partie parce que les couleurs de sa robe sont accentués et rendu plus lumineuse. Le regard du spectateur est donc attiré en premier par la femme, le sujet principal du tableau. Les autres éléments qui attirent l’œil en deuxième sont les porcelaines chinoise, dont les couleurs bleu et blanche les démarquent du fond beige et marron. On peut remarquer aussi le travail des détails de la robe et des objets. Les coups de pinceaux sont brossés et on peut remarquer que le visage de la femme voir d’autre éléments comme le meuble au fond, dont les détails sont rapidement brossé, ce qui donne une sensation de flou. Cela est probablement fait pour qu’on reste concentré sur la robe et les porcelaines, qui sont bien peints et bien détaillés par le peintre.

Pour conclure, comme disait le couple Pennell, biographes de Whistler, « Ce n’était pas le Japon qu’il voulait peindre, mais la belle couleur et la forme des détails japonais, comme l’expliquent les titres qu’il a ensuite trouvés pour les images: Violet et Rose, Caprice en Violet et Or, Harmonie en Couleur Chair et Vert, Rose et Argent », Whistler était avant tout intéressé par la couleur et les détails asiatique, mais pas par l’idée de représenté une pure scène d’inspiration japonisante où chinoise. Ce tableau reste quand même intéressant et important car montrant le talent de Whislter dans la mise en valeur des couleurs et montrant l’étendue du talent du peintre.


	

Laisser un commentaire